La jurisprudence en matière de harcèlement moral ou sexuel a été abondante l’année dernière. Retour sur les décisions les plus emblématiques…

La reconnaissance du harcèlement moral institutionnel :

Le Tribunal correctionnel de Paris a notamment reconnu dans « l’affaire France Télécom » le harcèlement moral institutionnel. C’est une première !

Le harcèlement moral institutionnel est fondé sur une politique d’entreprise définie au plus haut niveau et visant une collectivité de salariés. Cette notion permet d’atteindre pénalement, non seulement les dirigeants de l’entreprise, mais également tous ceux qui ont été initiateurs de cette politique ou qu’ils y ont prêté un concours actif.

Pour prouver le harcèlement moral institutionnel, il faut prouver que les agissements :

  • procèdent d’une politique d’entreprise ayant pour but de structurer le travail,
  • sont porteurs, par leur répétition, d’une dégradation des conditions de travail,
  • outrepassent les limites du pouvoir de direction.

Pour le tribunal correctionnel, la politique qui a été imaginée et appliquée par France Télécom était attentatoire aux droits et à la dignité des employés ainsi qu’à leur santé physique ou mentale. La politique de très forte réduction des effectifs a été menée au mépris des salariés.

(TGI Paris, 31e chambre, 2e section, 20 décembre 2019)

La prévention des risques de harcèlement :

L’employeur a une obligation de prévention des risques professionnels qui fait partie de l’obligation générale de sécurité des salariés. En matière de harcèlement moral, l’employeur est en première ligne, puisqu’il doit prendre toutes dispositions nécessaires en vue de prévenir de tels agissements.  

La Cour de cassation (arrêt du 27 novembre 2019) apporte des précisions sur la responsabilité de l’employeur. L’employeur averti d’une situation de harcèlement moral dont se plaint un salarié doit diligenter des mesures d’investigation en interne pour évaluer la situation et prendre, le cas échéant, les correctifs nécessaires.

En l’absence de toute réaction, l’employeur manque à son obligation générale de prévention et peut être condamné à indemniser le salarié du préjudice subi.

Dénonciation d’un harcèlement moral non avéré :

Le Code du travail précise qu’aucun salarié ne peut être licencié pour avoir rapporté des agissements de harcèlement (C. trav. Art. L 1152-2). Quant est-il si les faits ne sont pas avérés ?

Pour les juges, seule la mauvaise foi du salarié permet de faire tomber « l’immunité disciplinaire ». Cette mauvaise foi ne peut résulter que de la connaissance par le salarié du caractère mensonger des faits qu’il dénonce. Une erreur d’appréciation de la situation par le salarié ne peut donc pas donner lieu à sanction disciplinaire.

Didier FORNO

Assistance juridique du CSE

Publié le 13/03/2020