Les entreprises d’au moins 50 salariés doivent publier au plus tard le 1er mars 2024, leurs résultats obtenus à l’index de l’égalité professionnelle entre les femmes et les hommes.

S’il est imposé à tous les employeurs, quel que soit leur effectif, de « prendre en compte un objectif de suppression des écarts de rémunération entre les femmes et les hommes » (C. trav., art. L. 1142-7), seules les entreprises d’au moins 50 salariés doivent publier des indicateurs sur les écarts de rémunération entre les femmes et les hommes, remédier à ces écarts le cas échéant, et, à défaut de mesures correctives, peuvent se voir infliger une pénalité financière. 

L’égalité professionnelle femmes – hommes est l’un des grands enjeux de notre société. La législation des entreprises en la matière a fortement évolué ces dernières années. Le CSE (comité social et économique) et les organisations syndicales jouent un rôle important dans la négociation sur ce thème majeur.

Que dit la loi en matière d’égalité femmes-hommes ?

Cette égalité femmes-hommes est clairement affirmée par les textes législatifs.

Le troisième alinéa du Préambule de la Constitution du 27 octobre 1946 garantit l’égalité des droits reconnus aux femmes et aux hommes « dans tous les domaines ».

L’ article L1142-1 du Code du travail précise :

« Sous réserve des dispositions particulières du présent code, nul ne peut :

1° Mentionner ou faire mentionner dans une offre d'emploi le sexe ou la situation de famille du candidat recherché. Cette interdiction est applicable pour toute forme de publicité relative à une embauche et quels que soient les caractères du contrat de travail envisagé ;

2° Refuser d'embaucher une personne, prononcer une mutation, résilier ou refuser de renouveler le contrat de travail d'un salarié en considération du sexe, de la situation de famille ou de la grossesse sur la base de critères de choix différents selon le sexe, la situation de famille ou la grossesse ;

Prendre en considération du sexe ou de la grossesse toute mesure, notamment en matière de rémunération, de formation, d'affectation, de qualification, de classification, de promotion professionnelle ou de mutation ».

L’article L1142-5 du Code du travail ajoute : « Il incombe à l'employeur de prendre en compte les objectifs en matière d'égalité professionnelle entre les femmes et les hommes dans l'entreprise et les mesures permettant de les atteindre… ».

L’article L1142-7 est clair dans sa rédaction : « L'employeur prend en compte un objectif de suppression des écarts de rémunération entre les femmes et les hommes ».

Le calcul de l’index égalité F/H

 La loi n° 2018-771 dite loi Avenir du 5 septembre 2018 prévoit des mesures visant à supprimer les écarts de rémunération entre les femmes et les hommes dans l'entreprise.

Toute entreprise d'au moins 50 salariés doit, selon des modalités et une méthodologie définie aux articles D. 1142-2 et suivants du Code du travail, publier chaque année des indicateurs relatifs aux écarts de rémunération entre les femmes et les hommes (qui diffèrent selon que l'entreprise compte plus ou moins de 250 salariés) et aux actions mises en œuvre pour les supprimer (C. trav., art. L. 1142-8).

L'index de l'égalité professionnelle se compose de critères qui évaluent les inégalités entre femmes et hommes dans les entreprises : il en résulte une note sur 100.

Ces critères sont (C. trav., art. D. 1142-2 et s.) :

  • L’écart de rémunération entre les femmes et les hommes ;
  • L’écart de répartition des augmentations individuelles ;
  • L’écart de répartition des promotions (uniquement pour les entreprises de plus de 250 salariés) ;
  • Le nombre de salariées augmentées à leur retour de congé de maternité ;
  • Le respect de la parité parmi les 10 salariés ayant perçu les plus hautes rémunérations.

Les nouveautés pour l’index depuis 2022

En cas d’Index inférieur à 85 points, les entreprises doivent fixer et publier des objectifs de progression de chacun des indicateurs. En cas d’Index inférieur à 75 points, les entreprises doivent publier leurs mesures de correction et de rattrapage.

Ces mesures, annuelles ou pluriannuelles, et ces objectifs doivent être définis dans le cadre de la négociation obligatoire sur l’égalité professionnelle, ou, à défaut d’accord, par décision unilatérale de l’employeur et après consultation du CSE.

En cas de non publication de ses résultats de manière visible et lisible, de non mise en œuvre de mesures correctives ou d’inefficience de celles-ci, l’entreprise s’expose à une pénalité financière jusqu’à 1% de sa masse salariale annuelle.

 

Les critiques du calcul de l’index d’égalité

Les critiques de la méthodologie de calcul de l’index égalité professionnelle sont nombreuses. Cet index ne concerne que 1 % des entreprises et un quart des salariés français.

OXFAM France dénonce la méthodologie (Oxfam France est une association loi de 1901 qui a pour objectif de mobiliser le pouvoir citoyen contre la pauvreté) :

« Sous la pression du patronat, les indicateurs de l’index ont été construits de telle manière qu’ils permettent de fortement minimiser voire cacher la réalité des inégalités de salaires au sein des entreprises.

Par exemple, 15 points sont donnés selon le nombre de salariées augmentées à leur retour de congé maternité – ce qui est par ailleurs une obligation légale. Or, il suffit par exemple que l’employeur augmente toutes les salariées de retour de congé maternité d’un montant de 1 euro pour obtenir 15/15.

A contrario, une entreprise qui obtiendrait une note de 0/15 sur cet indicateur pourrait toujours avoir une note de 75 points et donc, aucune incitation à changer ses pratiques bien qu’elle soit en infraction avec la loi.

Un autre indicateur note l’écart d’augmentation individuelle, mais néglige le montant de cette augmentation. Si 10 femmes sont augmentées de 10€ tandis que 10 hommes sont augmentés de 100€, l’entreprise obtiendra tous les points sur cet indicateur.

Une autre critique concerne le « seuil de pertinence » prévu sur le tableau Excel du ministère du travail, qui correspond tout bonnement à une marge de tolérance de 2 à 5% des écarts de salaires. À nouveau, une entreprise qui pratique un écart de rémunération moyenne de 15%, donc de 10% après l’application automatique du seuil de pertinence pourra se prévaloir d’une note de 30/40 points et une note globale de 90/100.

Un des indicateurs qui comptent le plus de points, à savoir celui de l’écart de rémunération entre les hommes, fait l’impasse sur l’une des causes principales des inégalités de salaire : la question des temps partiels. Dans un monde du travail où 79,5% des emplois à temps partiel sont occupés par des femmes, calculer la rémunération équivalent temps plein masque les réalités financières d’une femme sur trois qui occupe un poste à temps partiel et qui est, en outre, rémunérée de manière partielle ».

 

Quel est le rôle du CSE en matière d’égalité professionnelle ?

En matière d’égalité femmes-hommes, le comité social et économique joue un rôle important.

L’ensemble des indicateurs calculés et le niveau de résultat obtenu, en matière d’égalité hommes femmes, doivent être mis à la disposition du CSE, via la BDESE (Base de données économiques, sociales et environnementales).

Selon le questions-réponses du ministère du Travail, cette transmission doit avoir lieu en amont de la première réunion qui suit la publication de l’index.

Au sein de la BDESE, les résultats doivent être présentés par CSP, niveau ou coefficient hiérarchique ou selon les niveaux de la méthode de cotation des postes de l’entreprise. Ces informations doivent être accompagnées de toutes les précisions utiles à leur compréhension, notamment relatives à la méthodologie appliquée, la répartition des salariés (par CSP ou niveaux de la méthode de cotation des postes de l’entreprise) et, le cas échéant, des mesures de correction envisagées ou déjà mises en œuvre.

Ces dispositions s’appliquent même en cas d’indicateurs incalculables. Dans ce cas, l’information du CSE est accompagnée de toutes les précisions expliquant les raisons pour lesquelles les indicateurs n’ont pas pu être calculés (C. trav., art. D. 1142-5).

Selon le questions-réponses du ministère du Travail, l’employeur doit également mettre à disposition du CSE le lien du site sur lequel sont publiés les résultats.

 Les entreprises ayant obtenu un Index inférieur à 75 points doivent transmettre au CSE, via la base de données économiques, sociales et environnementales (BDESE), leurs objectifs de progression pour chacun des indicateurs dont la note maximale n’a pas été atteinte, ainsi que les modalités de publication de ces objectifs et des mesures de correction et de rattrapage qu’elles ont dû définir conformément à l’article L. 1142-9 du code du travail.

Les entreprises ayant obtenu un Index compris entre 75 et 84 points doivent transmettre au CSE, via la BDESE, leurs objectifs de progression pour chacun des indicateurs dont la note maximale n’a pas été atteinte, ainsi que les modalités de publication de ces objectifs.

Le CSE est informé et consulté chaque année sur l'égalité professionnelle entre les hommes et les femmes ; cette consultation est incluse dans une grande consultation sur la politique sociale de l'entreprise (C. trav., art. L. 2312-26 à C. trav., art. L. 2312-35). Le CSE doit donc analyser les indicateurs pertinents sur le sujet et les aborder avec l’employeur, pour faire progresser le dialogue social.

A cette occasion, il peut recourir à un expert. L’expert est rémunéré par l’employeur.

 

Que nous apprennent les résultats 2023 de l’index de l’égalité professionnelle ?

L’index global 2023 continue sa progression, mais qui reste lente. 72 % des entreprises soumises à l’index ont répondu contre 61 % en 2022. La note globale de l’index est aussi en progression. Elle s’élève à 88 points contre 86 points l’année précédente.

Cette évolution positive est à relativiser. En effet, seuls 2 % des entreprises ont une note de 100, caractérisant une parfaite égalité de traitement. Les entreprises disposent d’une grande marge de progrès !

Le principal « point noir » concerne la part des femmes dans les dix plus hautes rémunérations. Seule une entreprise sur quatre respecte la parité.

Infographie publiée par le ministère du Travail, de l’Emploi et de l’insertion :

Didier FORNO

Expert-comptable CSE

CEOLIS

Publié le 02/02/2024