Heures de délégation : pour qui et combien ?

20 heures par mois

L’article L2325-6 attribue un nombre d’heures de délégation « qui, sauf circonstances exceptionnelles, ne peut excéder vingt heures par mois ».

Pour qui ?

  1. Aux membres titulaires du comité d'entreprise ;
  2. Aux représentants syndicaux au comité d'entreprise, dans les entreprises d'au moins cinq cent un salariés ;
  3. Aux représentants syndicaux au comité central d'entreprise dans les entreprises d'au moins cinq cent un salariés, mais dont aucun des établissements distincts n'atteint ce seuil.

Par ailleurs, le code du travail précise, dans son article L2325-8, que le temps passé par les élus (titulaires et suppléants) aux réunions officielles du CE et de la commission formation est considéré comme du temps de travail.

Crédit individuel et mensuel

Les heures de délégation sont individuelles : il n’est pas possible de les répartir entre les titulaires ou entre les titulaires et les suppléants. La jurisprudence interdit cette pratique.

De même, sauf usage ou accord plus favorable, les heures de délégation non utilisées ne sont pas reportables d’un mois sur l’autre.

Des conditions d’utilisation plus favorables pour la DUP (Délégation unique du Personnel)

L’article L2326-6, créé par la loi n°2015-994 (loi « Rebsamen ») prévoit des dispositions plus favorables quant à l’utilisation des heures de délégation.

En effet, il stipule que les heures de délégation peuvent être :

  • Utilisées cumulativement dans la limite de 12 mois ;
  • Réparties entre les titulaires et les membres suppléants, sous réserve d’en informer l’employeur.

Ces deux dispositions sont limitées car elles ne peuvent conduire à un élu de disposer, dans un mois, de plus de 1,5 fois le crédit mensuel.

Cas particulier des salariés à temps partiel

Un salarié à temps partiel élu titulaire au CE dispose d’un crédit d’heures de délégation identique (20 heures) à celui d’un salarié à temps plein. Le nombre d’heures de délégation n’est pas calculé au prorata du temps de travail.

Toutefois, le temps de travail mensuel d’un salarié à temps partiel ne peut pas être réduit de plus d’un tiers par l’utilisation des heures de délégation. Le solde des heures de délégation, qui doivent être payées comme le prévoit la loi, doit être utilisé en dehors des heures de travail du salarié à temps partiel (art. L3123-29).

Circonstances exceptionnelles

Le code du travail prévoit que des circonstances exceptionnelles peuvent amener un élu à utiliser plus de 20 heures de délégation dans le mois. Toutefois, celui-ci ne précise pas ce qu’est une circonstance exceptionnelle.

La jurisprudence indique qu’il s’agit « d’une situation inhabituelle nécessitant pour les représentants du personnel un surcroît de démarches et d’activités débordant le cadre de leur tâches coutumières, en raison notamment de la soudaineté de l’événement ou de l’urgence de la mesure à prendre » (Cass. crim. 3 juin 1986, n°84-94.424).

La survenue des élections professionnelles ne rentrent pas dans cette catégorie car l’événement est prévisible ; de même que la préparation de la réunion mensuelle.

Par contre, l’annonce par l’employeur d’un projet de restructuration (accompagné ou non de suppression d’emplois) est de nature à entraîner un surcroît inhabituel d’activité pour les membres du CE et donc justifie la prise d’heures de délégation supplémentaires.

Contrôle et paiement des heures de délégation

Information de l’employeur

L’employeur rémunérant les salariés qui prennent des heures de délégation et de manière à pouvoir organiser l’activité en cas d’absence d’un représentant du personnel, il est normal que celui-ci soit informé lorsqu’un élu s’absente.

Il peut donc mettre en place un système de « bons de délégation » mais celui-ci doit respecter certaines dispositions :

  • Il s’agit d’une information et non pas d’une autorisation
  • Le délai de prévenance doit être en accord avec la durée d’absence prévue
  • Seuls la nature du mandat (au cas où le salarié possède plusieurs mandats), la date et l’heure de début et de fin de la délégation peuvent être demandée. L’objet de la mission n’a pas à figurer sur le bon !
  • La mise en place doit être précédée par une consultation du CE.

Paiement des heures de délégation

Les heures de délégation sont, de plein droit, considérées comme du temps de travail et payées à l’échéance normale (art. L2325-7). Elles sont supposées avoir été utilisées conformément à leur objet et l’employeur ne peut exercer de contrôle a priori, c’est-à-dire avant le paiement, de l’usage qu’en a fait le salarié.

Congés payés
Les heures de délégation prises pendant les congés payés doivent être payées comme du temps de travail effectif. L’employeur peut donner la faculté au salarié de reporter les congés que le salarié n’a pas pu prendre (parce qu’étant en délégation) plutôt que de les payer.

Arrêt de travail
Un salarié peut continuer à exercer son mandat alors qu’il est en arrêt de travail (pour maladie ou accident) mais il ne pourra être payé au titre de ses heures de délégation que s’il a reçu l’autorisation expresse du médecin du travail d’exercer son mandat pendant son arrêt de travail ! (Cass. ch. Mixte 2 mars 2014, n°12-20.002 et n°12-20.003)

Pas de perte de rémunération
Le salarié ne doit subir aucune perte de rémunération du fait de l’exercice de sa mission. Il doit être rémunéré comme s’il avait travaillé normalement : le paiement des heures de délégation doit comprendre les éventuelles rémunérations annexes telles que pourboires, primes basées sur le temps de présence et toutes primes considérées comme complément de salaire du fait de leur fixité, de leur constance et de leur généralité.

Heures prises en dehors de l’horaire normal de travail
Un élu peut prendre des heures de délégation en dehors de son horaire normal de travail lorsque les nécessités du mandat le justifient. Ce sera le cas notamment s’il travail de nuit, avec des horaires décalés ou à temps partiel.

Pas de mention sur le bulletin de paye
« Il est interdit de faire mention sur le bulletin de paie (…) de l'activité de représentation des salariés » (art. R3243-4 alinéa 1).

« La nature et le montant de la rémunération de l'activité de représentation figurent sur une fiche annexée au bulletin de paie qui a le même régime juridique que celui-ci et que l'employeur établit et fournit au salarié » (art. R3243-4 alinéa 2).

Contestation de la bonne utilisation des heures de délégation par l’employeur

L’employeur ne peut pas contester a priori la bonne utilisation des heures de délégation. Celles-ci doivent être payées à l’échéance normale.

Toutefois, si l’employeur a un doute, il peut interroger le représentant du personnel concerné à ce sujet. Celui-ci est tenu de lui indiquer la nature des activités exercées durant les heures contestées. Au besoin, il peut formuler sa demande devant la juridiction compétente en saisissant le juge des référés pour obtenir l’information. Enfin, si la réponse du salarié ne le satisfait pas il peut saisir le conseil des prud’hommes pour demander le remboursement du paiement des heures de délégation estimées non justifiées.

Heures de délégation supplémentaires

Lorsqu’un représentant du personnel a pris des heures de délégation supplémentaires par rapport à son contingent mensuel du fait de circonstances exceptionnelles, l’employeur n’est pas tenu de les payer à l’échéance normale. Il appartient au salarié de demander le paiement de ces heures et d’apporter la justification du caractère exceptionnel de celles-ci.

Publié le 05/01/2016