La réforme du Code du travail est lancée. Édouard Philippe, le Premier ministre, vient de dévoiler le calendrier des prochaines semaines.

Le 28 juin 2017 présentation en Conseil des ministres du projet de loi autorisant les ordonnances. Du 9 juin au 21 juillet 2017, une « cinquantaine » de réunions seront organisées avec les syndicats et le patronat. Les thèmes abordés seront la nouvelle articulation de l’accord d’entreprise et de l’accord de branche, l’élargissement sécurisé du champ de la négociation collective, le regroupement des instances représentatives du personnel et le plafonnement des indemnités prud’homales.

 

L’inversion de la hiérarchie des normes du travail

Le premier thème de négociation, qui a fait couler beaucoup d’encre, lors de la mise en œuvre de la loi EL KHOMERI, concerne « l’inversion » de la hiérarchie des lois. La négociation d’entreprise prenant le pas, sur la celle de branche. Les partisans de cette mesure estiment que les salariés et les entreprises sont plus à même de négocier des accords, les syndicats de branche étant trop éloignés de la réalité économique de l’entreprise (concurrence, particularités liées au secteur d’activité).

Cette primauté de la négociation au niveau de l’entreprise risque de créer un modèle social à deux vitesses. D’un côté, les représentants du personnel des PME, sans grand pouvoir de négociation, sans moyen, sans formation, soumis à la bonne volonté du chef d’entreprise. De l’autre côté, les grandes entreprises, où le dialogue social est rôdé depuis longtemps, où les rapports de force existent, où les moyens financiers sont plus conséquents. Face aux « chantages » à l’emploi, un risque de disparition des avantages sociaux dans les PME, existe. Va-t-on vers la généralisation des salariés de seconde zone, dans PME ?

Cette situation présente d’ailleurs un risque important pour les employeurs. Quelle petite entreprise pourra recruter des talents, avec des avantages sociaux réduits au minimum ?

 

La généralisation de l’instance unique du personnel

La délégation unique du personnel (DUP) consiste à regrouper, en une seule instance, les délégués du personnel, le comité d’entreprise et le CHSCT. Cette possibilité qui existe aujourd’hui dans les entreprises de moins de 300 salariés devrait être étendue à toutes les entreprises, quel que soit l’effectif. Cette fusion présente le risque principal de diluer le rôle du CHSCT. Ce qui est paradoxal, dans un monde, où l’on n’a jamais autant parlé de conditions de travail et de burn-out.

Cette évolution semble hâtive. Le processus lié aux trois nouvelles consultations du comité d’entreprise (orientations stratégiques, situation économique et financière, politique sociale), issue de la loi Rebsamen, est très mal compris et mal appliqué, tant par les élus, que par les responsables des ressources humaines.

 

Le référendum d’entreprise

Avec le référendum d’entreprise, il sera possible de faire valider un accord d’entreprise, par les salariés. Ce processus va permettre aux dirigeants d’éliminer le contre-pouvoir des organisations syndicales. Avec le chantage à l’emploi, on voit mal comment d’addition des votes individuels, peut remplacer une négociation avec les représentants du personnel.

 

Plafonnement des dommages et intérêts des prud’hommes

Cette idée s’appuie sur un postulat, qui n’a jamais été démontré, à savoir, qu’un employeur n’embauche pas, parce qu’il est difficile de licencier.

Le principe du droit français est de laisser au juge le soin de fixer le montant des dommages et intérêts, en fonction du préjudice subi. Chaque situation est particulière. On rappelle que ce système du barème a déjà été censuré par le passé, par le Conseil constitutionnel.

 

Le Code du travail doit être simplifié. Au fil du temps, il est devenu touffu, obscur, difficile à mettre en œuvre dans certains domaines. Le risque de la réforme proposée est de créer un modèle social à deux vitesses, qui aura des répercussions non seulement pour les salariés, mais également pour les employeurs. Les semaines à venir seront cruciales, dans le choix du « modèle social à la française ».

Didier FORNO

CEOLIS

Publié le 16/06/2017