En cette période de canicule, il est parfois difficile de supporter des vêtements épais ou trop couvrants. Pour autant, un salarié peut-il s’habiller comme il l’entend au travail ?  (Extraits de l’article de Maître Éric ROCHEBLAVE)

La liberté de se vêtir à sa guise est-elle une liberté fondamentale ?

Non.

La liberté de se vêtir à sa guise au temps et au lieu du travail n’entre pas dans la catégorie des libertés fondamentales.

Un employeur peut-il imposer à ses salariés des contraintes vestimentaires ?

Oui mais, la restriction de la liberté individuelle d’un salarié de se vêtir doit être justifiée par la tâche à accomplir et proportionnée au but recherché. Ainsi, un employeur ne peut imposer à un salarié des contraintes vestimentaires que si elles sont justifiées par la nature des tâches à accomplir et proportionnées au but recherché.

Le port du survêtement peut-il être interdit ?

Pour les salariés d’agences immobilières : oui, s’ils sont en contacts avec la clientèle

La Cour d’appel d’Aix-en-Provence, qui a constaté que la salariée était en contact avec la clientèle de l’agence immobilière, a pu décider que la décision de l’employeur de lui interdire de se présenter au travail en survêtement était justifiée.

Le port du bermuda peut-il être interdit ?

Pour les salariés de la SAGEM : oui, s’ils sont en contacts avec la clientèle

Le bermuda est incompatible avec les fonctions d’agent technique d’un salarié de la SAGEM et ses conditions de travail qui pouvaient le mettre en contact avec la clientèle.

Le port du short et des tongs peuvent-ils être interdits ?

Oui.

Monsieur X. était employé en qualité de chargé de clientèle. Monsieur X. a été licencié pour être arrivé à l’agence, vêtu d’un tee-shirt de sport et d’un short long, et chaussé de tongs. Le règlement intérieur de l’entreprise imposait à tout membre de celle-ci d’adopter dans l’exercice de ses fonctions une tenue correcte.

Le port de la blouse blanche peut-il être imposé ?

Le refus du salarié de porter une blouse blanche pendant le travail ne peut être constitutif d’une faute qu’autant que l’obligation du port de ce vêtement est justifiée par la nature de la tâche à accomplir et proportionnée au but recherché.

Le port de la cravate peut-il être imposé ?

Pour le personnel ambulancier : non.

La Cour d’appel d’Orléans a jugé que la disposition d’un règlement intérieur imposant pour le personnel ambulancier le port obligatoire d’une cravate et précisant « pas de jeans ni de baskets » constituait une atteinte aux dispositions de l’article L. 1121-1 du code du travail.

Le port de l’uniforme peut-il être imposé ?

Pour les salariés des entreprises de prévention et de sécurité : oui, s’ils sont en contacts avec la clientèle

L’article 5 de l’annexe V de la convention collective nationale des entreprises de prévention et de sécurité, prévoit la possibilité d’une obligation formelle du port l’uniforme pour les agents de maîtrise affectés à certains postes fixes ou itinérants, ne concerne que les salariés en contact avec la clientèle.

Un salarié doit-il être correctement habillé ?

En exigeant que ses salariés soient correctement habillés, dans une tenue dont la couleur rappelle celle de l’enseigne de l’entreprise, et qu’ils soient encore correctement coiffés, l’employeur ne peut se voir reprocher d’apporter au principe de la maîtrise de l’apparence physique des restrictions non justifiées par la tâche à accomplir ou disproportionnées par rapport au but recherché, celui de servir au mieux la clientèle.

Un salarié peut-il être sanctionné de porter des boucles d’oreilles ?

La lettre de licenciement de Monsieur X… énonçait : « votre statut au service de la clientèle ne nous permettait pas de tolérer le port de boucles d’oreilles sur l’homme que vous êtes».

Il en résulte que le licenciement avait pour cause l’apparence physique du salarié rapportée à son sexe.

Ayant constaté que l’employeur ne justifiait pas sa décision d’imposer à Monsieur x… d’enlever ses boucles d’oreilles par des éléments objectifs étrangers à toute discrimination, la Cour d’Appel de Montpellier a pu en déduire que le licenciement reposait sur un motif discriminatoire.

Qui doit supporter les frais d’entretien du vêtement de travail obligatoire ?

L’employeur !

Il résulte des dispositions combinées des articles 1135 du code civil et L. 1221-1 du code du travail que les frais qu’un salarié expose pour les besoins de son activité professionnelle et dans l’intérêt de l’employeur doivent être supportés par ce dernier ; la clause du contrat de travail qui met à la charge du salarié les frais engagés pour les besoins de son activité professionnelle est réputée non écrite.

Le temps d’habillage et de déshabillage doit-il être rémunéré ?

Dès lors que le port d’une tenue de travail s’imposait aux salariés tant en application du règlement intérieur que des règles de sécurité propres aux postes d’agent de production qu’ils occupaient, et d’autre part, qu’il résultait de la mise à leur disposition par l’employeur d’armoires vestiaires individuelles ainsi que de la nature de leurs fonctions qui les amenaient à utiliser des produits chimiques et se révélaient salissantes, qu’ils devaient mettre et retirer leur tenue de travail dans les locaux de l’entreprise, la Cour d’appel de Colmar a justement fait droit aux salariés à leurs demandes tendant au paiement de la contrepartie financière du temps d’habillage et de déshabillage.

 

Éric ROCHEBLAVE
Avocat au Barreau de Montpellier
Spécialiste en Droit du Travail et Droit de la Sécurité Sociale
http://www.rocheblave.com

Publié le 29/08/2016